La Mutualité Française souhaite porter et promouvoir les questions de santé et de protection sociale à l’occasion des prochaines échéances électorales.
Ayant constaté lors des deux précédentes élections présidentielles que ces thématiques, pourtant parmi les plus importantes pour les Français, n’étaient que très peu débattues, la Mutualité Française a souhaité, non pas comme auparavant faire des propositions aux candidats, mais bien engager un réel débat, non partisan, en les interpellant et en leur proposant des réflexions, en s’appuyant sur leurs programmes.
La Mutualité Française Limousin a souhaité rassembler une partie des délégués des mutuelles adhérentes de la région en séminaire à Limoges à l’occasion du lancement du site internet www.placedelasante.fr.
Ce site internet participatif est ouvert au grand public, mutualiste ou non, alimenté par des experts de la sphère des mutuelles ou de la Fédération nationale de la Mutualité Française (FNMF), et par des contributions d’internautes.
La Mutualité Française s’appuie également sur trois partenaires (think tanks) :
- Terranova ;
- Fondapol ;
- La fondation Jean-Jaurès.
Les délégués des mutuelles en Limousin ont choisi de participer au débat national en rédigeant des contributions pour alimenter le site internet lors du séminaire de ce 23 janvier 2017 dans trois thématiques de santé sur les huit proposées, considérées comme très prégnantes en Limousin :
- La complémentaire-santé ;
- L’accès aux soins ;
- Le maintien de l’autonomie.
Une vingtaine de contributions a été rédigée par la soixantaine de délégués présents, elles seront insérées incessamment sur le site internet.
Toutes les contributions seront synthétisées et consolidées par la FNMF pour être présentées aux candidats aux élections présidentielles et/ou à leurs équipes lors d’une grande réunion publique organisée à Paris (au Palais Brongniart) le 21 février 2017.
Les candidats pourront s’emparer de ces questionnements et apporter des réponses.
Le séminaire des délégués est une des actions proposées en Limousin, il sera suivi de rencontres des organismes partenaires locaux, de certains élus et des candidats aux élections législatives.
Les principales réflexions ayant émergé durant cette journée de travail sur la « place de la santé » dans le débat présidentiel sont les suivantes :
En matière de complémentaire-santé :
Les délégués n’ont pas manqué de souligner la méconnaissance manifeste d’un certain nombre de candidats à l’élection présidentielle du fonctionnement spécifique, des valeurs et du rôle essentiel des mutuelles dans le système de protection sociale.
Les délégués, tous bénévoles, engagés, ont souhaité rappeler aux candidats que les mutuelles agissent bien au-delà du simple remboursement de soins. Leur fonctionnement s’appuie en effet :
- à la fois sur une solidarité financière et intergénérationnelle ;
-
sur un système démocratique (un homme, une voix).
(Ehpad, établissements d’accueil du jeune enfant, centres dentaires, cliniques, logements adaptés aux personnes âgées ou souffrant de handicap…) ;
- des relations avec les professionnels de santé et des conventions signées avec les établissements de santé, publics comme privés pour limiter les restes à charge des patients et offrir une offre de soins la plus équilibrée possible sur le territoire.
En Limousin, on compte près de 145 actions de prévention réalisées (2016), touchant 5 593 personnes et près de 80 services de soins.
Peu d’organismes peuvent à ce jour afficher une telle diversité de prestations au service de la population, mais naturellement ces interventions et cette présence en local ont un coût.
Parallèlement, il a été relevé par les délégués l’idée que les mutuelles étant bien impliquées de fait dans la solvabilisation des soins, elles souhaiteraient un réel partenariat tripartite entre l’Assurance maladie obligatoire (la Sécurité sociale), l’Union nationale des organismes d’assurance maladie (l’Unocam) et les professionnels de santé. Ce manque de reconnaissance confine ainsi le débat entre deux entités seulement (professionnels de santé et Sécurité sociale).
La différence majeure entre Assurance maladie et mutuelles a été rappelée, à savoir que les mutuelles sont contraintes à l’équilibre financier en fin d’année, ce qui n’est pas le cas de l’Assurance maladie.
La première entorse à la solidarité intergénérationnelle est bien la dette sociale qui sera payée par nos enfants, voire nos petits-enfants.
Il semble que l’on ait moins besoin d’un Etat omniprésent, qui multiplie les réglementations que d’un Etat « stratège », avec une hauteur de vue réelle pour réorganiser le système, sortir du marasme nourri d’un côté par la nécessité de dispenser des soins et de l’autre par une course effrénée aux financements.
Les Français sont foncièrement attachés à un système de médecine libérale, qui a montré pendant de longues années sa pertinence et sa capacité à améliorer la situation sanitaire et la santé de la population, enviable par rapport à de nombreux autres.
Ils sont également très attachés à leur système de Sécurité sociale qui mutualise les risques et s’appuie sur la solidarité nationale, dont on a bien besoin aujourd’hui.
C’est bien entre ces deux domaines que se trouve la solution d’une meilleure articulation des soins alliée à un dispositif de solvabilisation pérenne.
Concernant l’accès aux soins :
Les délégués ont été particulièrement sensibles à cette thématique compte tenu du caractère rural très affirmé du Limousin et de ses difficultés d’accès aux soins.
La lutte contre les déserts médicaux, souvent abordée par les candidats, prend tout son sens sur notre territoire.
Une des solutions suggérées par les candidats est de favoriser l’émergence de maisons de santé pluri-professionnelles. La Mutualité Française Limousin est depuis plusieurs années active dans ces démarches (avec une convention notamment signée avec le Conseil régional et l’Agence régionale de santé en 2013) et souhaite rappeler les avantages de ces structures qui permettent aux professionnels de santé, les médecins particulièrement, de :
- travailler à la campagne sans forcément s’y installer ;
- pratiquer un exercice partagé et coordonné grâce au Dossier médical partagé du patient (DMP) et à la présence de plusieurs corps de métier (masseurs-kinésithérapeutes, infirmiers, dentistes, transporteurs sanitaires…) ;
- travailler sur des plages horaires raisonnables et adaptées, au contraire des pratiques de leurs prédécesseurs qui les rebutent aujourd’hui ;
- offrir à leur patientèle un pôle de soins diversifiés et complémentaires,
- proposer des actions de prévention pour des maladies chroniques par exemple de plus en plus fréquentes (comme le diabète de type 2…) et que le médecin n’a pas le temps de mettre en place lui-même ;
- alléger la charge de travail organisationnelle et administrative des professionnels de santé en s’appuyant sur un secrétariat partagé et/ou une personne en charge de la coordination.
Néanmoins, il est important de souligner que ces projets de maisons de santé ne peuvent exister sans une fine réflexion sur l’organisation des soins sur l’ensemble du territoire en prenant en compte la répartition entre soins de ville et hôpital comme la répartition des compétences.
S’agissant des réseaux de soins, les mutuelles ont été bien souvent malmenées (optique, dentaire, audioprothèse…), pourtant ces réseaux ont atteint leur objectif, à savoir faire baisser les prix, proposer aux adhérents mutualistes, ou non, des produits s‘appuyant sur des gammes de qualité à des tarifs maîtrisés.
Les dépassements d’honoraires sont également un des domaines sur lesquels la Mutualité aurait aimé avancer sur la contractualisation, via une démarche concertée avec les professionnels de santé, mais la loi dite Le Roux (réseaux de soins) ne l’a pas autorisée avec les médecins. L’objectif est de permettre le meilleur accès aux soins possible et ce, sur l’intégralité du territoire.
Concernant le maintien de l’autonomie :
Les délégués réunis en séminaire ont également souhaité la mise en place de personnes référentes (médecins, infirmiers…) qui pourraient accompagner les patients tout au long de leur pathologie, notamment en cas de maladies chroniques, ou pour des personnes âgées ou en situation de perte d’autonomie.
Cet accompagnement est quelquefois proposé par des associations, il s’agirait de systématiser ces actions.
S’agissant de la prise en charge de la dépendance, la proposition consensuelle d’un financement appuyé largement sur la solidarité nationale comprenant une partie qui pourrait être laissée à l’initiative individuelle, a été clairement exprimée.
L’effort serait à mener sur deux fronts :
- de manière immédiate, des mesures augmentant le montant de l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA), pour accompagner les personnes âgées ;
- en anticipant, le lancement d’une réflexion ambitieuse pour les trente prochaines années, pour la mise en place d’un dispositif « assurant » l’avenir de ceux qui sont aujourd’hui bien portants dans le cadre d’une « future » perte d’autonomie, appuyé sur des mécanismes à mettre en œuvre au plan financier et en termes de prévention. Tous les médecins s’accordent à dire que nos « vieux jours » dépendront largement de la manière dont nous nous comportons aujourd’hui, de réels efforts sont donc à faire en matière de prévention.
Enfin, ont été proposés l’étude et le développement de certaines nouvelles technologies, telles que la télémédecine, l’installation de matériel de domotique au domicile des personnes âgées (avec un but de surveillance sans intrusion, par exemple)… dans un cadre bien défini.
La fracture numérique s’avérant cependant totalement corrélée à la fracture sanitaire, cette dimension devra être prise très au sérieux.
Ces équipements devront bénéficier d’une montée en charge économique sur la durée. Les candidats à l’élection présidentielle devront prendre conscience que des régions vieillissantes comme le Limousin, si elles peuvent être assimilées à un « laboratoire », nécessiteront des actions et des financements rapides.
En conclusion, les débats des délégués des mutuelles durant le séminaire ont souligné la qualité du système de santé français, à comparer avec ceux des pays anglo-saxons ou de nos voisins européens. Il ne s’agit pas de pourfendre ce système, mais au contraire de le faire évoluer tout en le protégeant.
Les délégués des mutuelles présents ont affirmé leur fierté d’être mutualistes, d’avoir contribué à construire ce système et entendent bien accompagner son avenir.